Ces défis auxquels font face les caféiculteurs dans le massif du Ruwenzori dans la province du Nord-Kivu en RDC.

Ces défis auxquels font face les caféiculteurs dans le massif du Ruwenzori dans la province du Nord-Kivu en RDC.

Plus de 1800 caféiculteurs regroupés au sein de la coopérative kawa kanzururu sont actifs dans le massif de Ruwenzori en territoire de Beni au Nord-Kivu à la frontière entre la RDC et l’Ouganda. Cette coopérative n’est pas encore en mesure de transformer le café produit. Elle se limite à la production, la collecte, le traitement et la commercialisation du café produit par ses membres réunis dans diverses Micro-Stations de Lavage (M.S.L.). Grâce à à InfoNile un travail de cartographie de ces différentes MSL a été réalisé. Une occasion  pour palper les conditions difficiles de production du café. C’est notamment l’insécurité dans le champ, le manque de route de dessertes agricoles, mais aussi l’eau qui pourtant est disponible, mais non accessible. Pour atténuer leur souffrance, les caféiculteurs attendent les retombées positives de la certification fairtrade dont bénéficie déjà leur coopérative depuis deux ans.

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La beauté du massif de Ruwenzori n’est pas seulement ses neiges et les pluies interminables. C’est aussi et surtout, la culture du café dans sa variété arabica connue pour être adoptée sur des hautes terres. Ici, 22 micro stations de lavage de cafés y sont entretenues, autour desquelles les caféiculteurs sont fédérés. 

Ces MSL engagent un personnel dont le nombre peut varier entre 2 et 5 membres. Leur tâche est d’accueillir les agriculteurs qui veulent vendre et traiter leur cerise ici. 

Ce traitement consiste au dépulpage, la flottaison, la fermentation, le lavage, le triage, le séchage homogène etc. Lors de la petite saison (février à mai) leur travail n’est pas aussi intense que  celui de la grande saison (Août à octobre -novembre ).

L’eau, un composant essentiel dans le traitement du café

Vosi Luzegha est président de la coopérative kawa Kanzururu depuis 6 ans. Selon lui, pour obtenir un kilogramme (1 kg) de café “fully washed”, il faut au moins une quantité de vingt litres (20 L) d’eau. Il explique que dans le processus de traitement du café, l’eau occupe une place de choix.

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Femme agricultrice en plein tri des parches sur un étalage à la micro station de lavage de Café à Luseke/Rwenzori

La coopérative Kawa kanzururu (café blanc en langue locale ) existe depuis  2014. Elle a son siège dans la commune rurale de Lume dans le secteur de Ruwenzori à une soixantaine de kilomètres à l’est de la ville de Beni dans la province du Nord-Kivu. 

C’est depuis 2017 que des chiffres sur le café produit sont disponibles au sein de la coopérative. Ce qui fait que c’est depuis cette année-là que la quantité de l’eau utilisée peut être évaluée.

L’eau disponible mais pas accessible, une insécurité grandissante et des routes des dessertes agricoles inexistants

A plus de deux heures de marche du siège social de la coopérative, se trouve la microstation du lavage de café de Vugherwa. Celle-ci répond à la majeure partie des défis auxquels les agriculteurs du café font face les 25 cultivateurs qui sont membres. 

L’eau est à presque un kilomètre de la sous-station de lavage. Valerie Muhavura, gérant de cette microstation explique qu’il faut transporter au dos le café dépulpé pour le fermenter et le laver à la rivière. Ce qui est fatiguant vu qu’à chaque saison sa microstation produit  entre 8 et 10 tonnes de cerises. “Nous lavons le café à la rivière  Lume. Ce qui nous fatigue énormément. Nous souffrons”, a-t-il expliqué avec insistance.  Pas de route non plus. 

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Parches sur des étalages à la micro station de lavage de Rugetsi

Pour y accéder il faut arpenter un sentier tout aussi impraticable lorsqu’il pleut.Le transport se fait par le dos jusqu’au siège de la coopérative où toute la production est centralisée. “Je mobilise parmi les agriculteurs membre de cette microstation afin de l’aider à évacuer le café jusqu’à Lume (Ndlr) avec nos dos. Si la route pouvait être aménagée jusqu’ici ça serait un soulagement pour les producteurs du café”, souhaite-t-il. 

De son côté la micro station la microstation de Kavalya n’a pas aussi des facilités à accéder à l’eau.

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Machiniste en plein dépulpage des céruses à la Micro station de Kavalya/Rwenzori Crédit photo Jonas Kiriko

“Il y a un ruisseau à 1 km d’ici que nous devions de son lit lorsque nous avons besoin d’utiliser de l’eau en grande quantité.Cela nous craint parfois des mésententes avec les propriétaires des champs que notre canalisation emprunte jusqu’ici à la micro station”, a fait savoir Kasereka gérant de cette micro station.  

Dans plusieurs micro stations de lavage de café, l’eau se trouve à de longues distances. Le changement climatique n’est pas encore ressenti comme une cause du manque d’accès à l’eau. 

Les agriculteurs ont donc besoin d’un mécanisme leur permettant d’accéder à l’eau directement dans leur microstation. En particulier, le système d’alimentation en eau et où le relief est accidentel, des motopompes peuvent être utilisées.

Du point de vue sécuritaire, toute la zone est en proie à l’activisme du groupe islamiste de l’ADF qui tue des population à la machette. La microstation de Mwenda en a déjà payé les frais avec le massacre de cinq de ses membres. 

Selon Vihamba Roger, gérant de cette MSL, cette situation influe négativement sur la quantité de la production. 

 “Nous travaillons dans une situation sécuritaire précaire. Cinq de nos membres sont morts égorgés par des ADF dans leurs champs. À cause de l’insécurité, personne ne peut se rendre dans son champ. Les champs ne sont plus entretenus. Ce qui pourra influer négativement sur le rendement dans les jours avenirs. Nous implorons vraiment le retour de la paix”, demande-t-il. 

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Agriculteur entrain de trier les parches fraichement sortis de la machine à micro station de lavage de café de Kavalya/Rwenzori

Cette zone comme pour le reste des entités des provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri sont sous état de siège depuis le 06 mai dernier. Mais les résultats tardent à suivre. Au moins 1.302 personnes ont été massacrées depuis la proclamation de l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, indique une enquête intitulée « rapport Yotama sur les massacres de Beni et Irumu”

Ce rapport a été dressé par deux frères “Yotama”dont l’un est député provincial du Nord-Kivu et l’autre est député national, tous élus de la ville de Butembo. Afin de mettre un terme  à cette insécurité, le gouvernement congolais vient de lancer des opérations militaires conjointes avec l’UPDF de l’Ouganda.

Le covid-19 épargne les caféiculteurs

En 2019 quand la covid-19 est déclaré, la coopérative Kawa Kanzururu vient de bénéficier de la certification fairtrade sur la marché international. Ainsi elle a continué de produire et d’exporter son café vers l’etrangers.

 Selon Kasereka Tata wa Makolo, directeur-gérant de Kawa kanzururu, des mesures ont été prises, afin de mettre les caféiculteurs à l’abri de la covid-19. 

La coopérative a vite élaboré un plan de contingence pour lutter contre la maladie. Il prévoit de suspendre les rassemblements, l’installation des dispositifs de lavage des mains dans chaque MSL, le port obligatoire des caches-nez à nos membres et nous avons encouragé d’autres à se faire vacciner lorsque le vaccin a été rendu disponible. Au stade actuel personne n’a contracté la maladie, nous estimons que c’est une réussite”, s’est-il félicité. 

Cependant, en 2019 et 2020 certains caféiculteurs ont fait la rétention de leurs productions à cause des mesures barrières. 

La frontière fermée ainsi que les restrictions de voyager ont fait qu’ils craignaient que leurs productions se perdent. C’est ainsi qu’en 2021 avec l’allègement de certaines de ces mesures barrières, les caféiculteurs se sont sentis rassurés” explique le directeur gérant.

Viz:  https://public.flourish.studio/visualisation/8850199/

Le gouvernement congolais a dernièrement maintenu le couvre-feu, renforcé la surveillance du port du masque,  a vivement conseillé la vaccination. Il s’agit des mesures édictées par l’autorité publique, en vue de prévenir d’une éventuelle quatrième vague et de la découverte, il y a quelques jours, du variant OMICRON.

La certification FairTrade pour soulager les caféiculteurs?

Depuis 2020, la coopérative Kawa Kanzururu a reçu la certification fairtrade. Kasereka Prince est ingénieur agronome et chargé de certification pour la coopérative Kawa kanzururu. Il explique que la certification fair trade est une garantie pour un marché permanent.

 “Nous avions un problème de clientèle mais à travers cette certification fairtrade nous avons l’assurance d’un marché permanent et à bon prix bref en traitant notre café dans les différentes micro stations nous avons la garantie qu’il est déjà acheté baise ou pas du prix, notre marché reste stable.” 

C’est aussi un chemin pour la valorisation de l’agriculteur. Fair trade exige qu’en achetant auprès des agriculteurs que l’acheteur leur offre une prime sociale pour leur accompagner dans l’aménagement des routes de dessertes agricoles, la construction des écoles, des centres de santé ou l’érection des ponts et des sources d’eau potables au bénéfice de la communauté entière etc. C’est donc l’agriculteur du café de Rwenzori qui sort gagnant”, conclut-il. 

Concrètement, Fairtrade facilite l’accès aux marchés sous certaines conditions, notamment l’affectation par la coopérative des bénéfices pour la réhabilitation des infrastructures, la construction de routes, l’aménagement des points d’eau, l’accès aux bourses pour les enfants des agriculteurs, etc. 

Dans la situation actuelle, les paysans ont décidé en assemblée générale que les bénéfices tirés de leurs deux ventes précédentes soient affectés au paiement de la part sociale, car de nombreux adhérents n’avaient pas encore payé leur part sociale. Kasereka Prince chargé de la certification a dit que ce sont les prochaines retombées qui seront dirigées vers les infrastructures communautaires conformément à la décision de l’assemblée générale .

Il sied de faire remarquer que l’initiative de certification Fairtrade a été créée pour former une nouvelle méthode pour le commerce économique. Cette méthode adopte un point de vue éthique et considère d’abord les producteurs.

Fairtrade International a commencé avec l’industrie du café, mais couvre maintenant une gamme de produits tels que le cacao, les fruits, le coton, les fleurs, le thé et autres. Les acheteurs établis de ces produits constituent un marché de niche, ce qui rend le marketing de Fairtrade difficile, peut-on lire sur www.fairtrade belgium.be. Parmi les clients du café produit par les agriculteurs dans le Rwenzori figurent higher ground trading, malongo, volcafe select etc    

De son côté, Patrick Bakwanamaha, chercheur au sein de l’Université Chrétienne Bilingue au Congo encourage  les agriculteurs à adhérer à la coopérative. Cela est l’un des moyens pour améliorer leur production et leur condition de travail. 

Ce responsable du laboratoire café-cacao au sein de cette université encourage la coopérative à penser à transformer localement pour permettre de multiplier les sources de revenus de ses membres. 

Dans cette vidéo, il revient sur la nécessité de maintenir le traitement humide du café pour maintenir sa bonne qualité. 

Selon le journal belge Le Soir, le café est la troisième boisson la plus consommée au monde après l’eau et le thé. A cette période de la covid, le marché du café a fait un bond en avant en Europe. 

Cet article a été soutenu par InfoNile avec un financement du programme de partenariat IHE-Delft Water and Development.

Jonas Kiriko

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